charlotte ◮ all this bright world is synonymous of empty

you know you love me

« Lennon est une petite fille ambitieuse. Le Tennessee ne sera jamais assez grand pour elle. Il lui faudra toujours plus. Elle est intelligente, rusée et observatrice. Elle s’en sortira quoiqu’il arrive. Mais elle est aussi impulsive, avide et un peu prétentieuse. Tous les garçons sont à ses pieds à l’école. Le petit Jimmy lui a même donné tout son argent de poche dans l’espoir de devenir son ami. J’ai peur que le succès lui monte à la tête. C’est facile de sortir du droit chemin. Il faudra veiller à ce qu’elle ne s’écarte pas trop. Ma tante Hedwige disait que les jolies filles ont toujours le cœur entre les cuisses. Quand j’y réfléchis, je me dis que c’est un peu vrai. Je sais que Lennon a seulement quatre ans mais… elle sera adolescente avant que tu ne t’en rendes comptes. Alors ne la laisse pas se faire avoir. » La femme qui parlait arrêta de fixer la fenêtre où de lourds nuages gris flottaient et se tourna vers son mari qui retenait difficilement son émotion en serrant la main de son épouse et en hochant la tête. « Quant à Charlotte… Elle vient tout juste d’avoir trois ans mais je me l’imagine déjà plus tard. Ce sera une femme forte qui aimera beaucoup de choses, particulièrement ce qui sort du chemin. Elle préfère jouer à des jeux de garçons qu’à des jeux de filles. Elle aime tout ce qu’elle voit, elle est curieuse de tout et tu as vu son dernier dessin ? Elle a un talent pour dessiner je crois. Il faudra l’encourager dans cette voie là. Lui offrir des crayons, lui faire prendre des cours même. Elle a déjà des goûts prononcés, elle sait ce qu’elle aime et ce qu’elle n’aime pas. Elle a du caractère et pour la dompter, crois-moi il faudra s’accrocher. Fais lui prendre des cours d’équitation. Dis-lui que sa mère adorait monter. Elle aura besoin de ça. Je sais qu’elle ne se rappellera pas de moi. Comme ça, on aura une activité mère/fille même si je ne suis plus là pour la voir gagner ces concours. Elle en gagnera plein, j’en suis sûre. Et… Charlotte est une petite fille très forte. Quand elle tombe, quand elle a mal, elle ne le dit pas. Il faudra briser ses barrières, toucher sa sensibilité. C’est une rebelle dans l’âme. Je le sens. Ne la laisse pas trop se refermer sur elle-même. » Son mari hocha une nouvelle fois la tête. « Donne-leur le meilleur. J’ai besoin que tu me promettes que tu feras tout pour leur rendre les filles heureuses. Tu me le promets ? » L’homme mit du temps à répondre parce que soudain les bips du moniteur ralentirent. Il paniqua, pensa appeler une infirmière puis se rappela que ce moment devait arriver. Qu’aujourd’hui – jour de Thanksgiving où les gens étaient heureux – il avait laissé ses deux filles chez sa mère après qu’elles aient dit au revoir à leur maman et que lui restait là à son chevet en attendant que son épouse, la femme de sa vie, rende son dernier souffle. Il ferma les yeux, prit sur lui, et finit par promettre. Sa femme sourit, de ce sourire qu’il aimait tant et ses paupières se fermèrent doucement. Un bip long et douloureux résonna dans la pièce, dans sa tête, dans sa poitrine. Puis plus rien. Le silence. Rapidement déchirés par ses sanglots quand le mot apparut dans son esprit. Il était veuf.

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C’était à ça que pensait Jonathan Hemingway alors qu’il avait demandé à ses deux filles de venir le rejoindre dans la cuisine pour avoir une petite discussion. Sa femme ne s’était nullement trompée concernant ses deux filles. Elles étaient comme elle les avait décrites. Ce qu’elle n’avait pas prévu – du moins il ne le pensait pas sinon elle lui aurait donné quelques conseils pour gérer cela car il n’avait aucune idée de comment résoudre le problème – c’était que les personnalités opposées de ses deux filles mèneraient à des disputes fréquentes, des avis toujours différents et au final à une sorte de haine fraternelle qu’il n’arrivait pas à gérer. Et il savait d’ors et déjà que la décision qu’il allait leur annoncer aller ravir l’une tandis que l’autre allait violemment protester. « Je ne sais pas exactement par où commencer mais… votre mère m’a fait promettre le jour de sa mort de faire de mon mieux pour vous donner le meilleur. Et une opportunité s’est présentée à moi. J’ai longuement hésité à la prendre mais finalement il s’avère que… Au vu des incidents qui se sont passés les dernières années… » Charlotte avait volé dans un magasin, Lennon en était venue aux mains avec une autre fille, l’ambiance était tendue à chaque Thanksgiving et il en passait. « … Je pense que c’est une opportunité pour nous de repartir à zéro. Charlotte l’année prochaine tu rentres au lycée et toi Lennon à l’université et je sais que tu ne sens pas toujours à l’aise au ranch mais que tu ne veux pas partir trop loin d’ici. Alors j’ai décidé qu’on allait déménager… A New-York. » Le cri de joie de Lennon couvrit celui de protestation de Charlotte qui n’arrivait pas à croire ce qu’elle venait t’entendre. New York ? NEW YORK ? Cet endroit où le seul lieu de nature était un parc immense qu’on pouvait à peine fréquenter sans risquer sa vie parfois ? Cet endroit où les buildings étaient immenses et qui pullulaient comme la peste ? Cet endroit pollué comme pas possible où le taux de criminalité était insolent ? Hors de question. Pas moyen. Non. Niet. Nada. Elle se leva brusquement, faisant racler la chaise, attirant efficacement l’attention de son père et de sa sœur et partit en claquant la porte. Elle se dirigea vers les stalles et ouvrit le box de Summer, un pur-sang arabe magnifique avec lequel elle avait gagné des tas de concours. Le cheval hennit gentiment en la reconnaissant et elle enfouit son visage dans sa crinière. Qu’allait-on faire de Summer ? Pas moyen qu’il vienne à New York. L’abandonner lui déchirer le cœur. Elle ne voulait pas partir. Quitter ses grands espaces verts, quitter sa routine, la tombe de sa mère, sa maison, ses quelques amis – pas aussi nombreux que ceux de sa sœur mais au moins sincères – et tout ce qui définissait qui elle était. « J’ai… trouvé un endroit pour Summer. Une écurie qui accueille des chevaux. Et pas n’importe quels chevaux, les meilleurs. Il aura des soins de luxe. Tout comme toi. On va avoir une meilleure vie ma puce. » « Et d’où sort tout cet argent ? » cracha Charlotte. « J’ai signé de bons contrats dernièrement. Tu iras dans un lycée privé. Constance Billard. Tu auras les meilleurs cours, on t’ouvrira les portes de Yale, Princeton, Harvard. Tu auras tout ce que tu mérites. Ce que ta mère voulait pour toi et ta sœur. » Charlotte se tourna brusquement vers son père, les yeux lançant des éclairs. « Je suis certaine que Lennon est déjà en train de plier bagages mais crois-moi elle l’aurait fait. Elle serait partie à New York, famille ou pas. Et elle se serait très bien acclimatée sans nous. Maman a dit qu’elle voulait le meilleur pour nous. Mais elle ne parlait certainement pas d’argent. Tout le monde me dit que c’était une femme simple, qui aimait les choses simples. La nature, les animaux, la famille. Pas des gratte-ciels, des lycées remplies de pouffes et d’autres trucs du genre. Tu as pensé à moi ? Ma vie est ici ! » Son père s’approcha d’elle et prit son visage en coupe. « Chérie, tu as 14 ans. Tu n’as même pas encore vécu. Je pense à toi crois-moi. C’est dur pour moi aussi de quitter notre maison, nos amis, ta mère. Et c’est certain que Lennon sera celle qui s’adaptera le mieux. Mais tu sais ce que les gens disent ? Que tu aies le portrait craché de ta mère. Tu as les mêmes passions, tu lui ressembles beaucoup et ta grand-mère maternelle pleure dès qu’elle te voit. Ce n’est pas une vie pour toi ma chérie. On vit avec un fantôme et ta mère ne voulait certainement pas ça. On doit la laisser partir. New York sera bien, tu verras. » Charlotte baissa la tête pour cacher ses larmes, sa faiblesse. Son père la tira à lui et la prit dans ses bras, la laissant pleurer tout en la berçant. Elle ne voulait pas partir. Mais elle avait envie d’y croire. Croire qu’au fond, tout irait mieux. Mais ce ne serait pas le cas.

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« Sois franche. Raconte-moi tes pires souvenirs. » « Oh. Ok. Ca revient à te raconter ma vie depuis que je suis à New York. Spécialement les années lycées. Les pires années de ma vie. »
« Où sont mes céréales ? » Il était à peines sept heures et demie du matin quand une blonde – les cheveux en pétards – outragées sortit un paquet de céréales qui n’était définitivement pas le sien. Elle se tourna vers son père, les yeux tueurs. Elle avait une journée horriblement chargée entre les cours, les séances de hockey ensuite et des cours de soutien, elle ne pouvait pas commencer sa journée de mauvaise humeur sans tuer quelqu’un par la suite. « Demande à ta sœur, c’est elle qui a fait les courses. » « Lennon ? » « Quoi ? Ce sont des céréales bonnes pour la ligne, j’ai pris au chocolat parce que je sais tu aimes ça. Tu pourrais remercier, s’il n’y avait eu que moi j’aurais pris à l’avoine. » « Mais il n’y a pas de jouet dans celui-là ! » « Sérieusement Char’ ? Tu as quel âge 5 ans ? Ah non, 16. Désolée. Ce n’est qu’une stupide babiole dans un stupide paquet en céréales pour enfant qui fait le double de calories, grandis un peu. » « Mais je m’en fiche de l’âge que je sais. Je pourrais bien avoir cinquante piges, je veux mes céréales. » « Ca suffit les filles. Charlotte, fais un effort pour ce matin, j’irais t’acheter tes céréales dans la journée. » L’homme soupira en entendant une porte claquée avant même qu’il ait pu finir sa phrase.
« J’arrive pas à croire que tu aies fait ça ! Tu es rentrée dans ma chambre et tu as piraté mon ordinateur ? » « Piraté ? Oh arrête, j’ai juste trouvé ton mot de passe. Soit dit en passant ‘ilovekurt’ est un mot de passe à chier. » « Tu as posté des photos de moi nue sur toute la toile et sur Gossip Girl ! » « Je t’arrête tout de suite. Je n’ai rien envoyé à cette fille. Je sais que c’est ton truc à toi et toutes tes copines de descendre tous ceux que vous ne pouvez pas saquer sur le site. Mais moi j’ai un minimum de fierté. Quand je n’aime pas quelqu’un je lui dis en face. Je ne vais pas la pourrir anonymement. Ta grande copine GG a trouvé les photos toutes seules. » « Tout le monde me voit nue Char’ ! Tous mes amis. C’est la honte de ma vie. » « La majorité de tes amis t’ont vu nu Lenny. Comment une paysanne du Tennessee rentre dans l’élite de Manhattan autrement, dis-moi ? » « Arrêtons de prétendre que tu ne rêves pas de devenir aussi populaire que moi. » « Oh, tu veux dire coucher avec tout ce qui bouge, me retrouver nue sur internet, me soumettre à une inconnue sur internet et la laisser raconter tout sur moi, boire et faire la fête, claquer du fric et tout. Non, non je ne crois pas. J’ai bientôt dix-huit ans, la seule que je veux c’est avoir mon diplôme et aller à l’université de New-York avec tous les pauvres et vivre loin des sphères de ton petit monde aussi profond qu’une piscine gonflable. »
« J’exige des explications Charlotte. Je ne crois pas t’avoir élevé dans l’idée de te faire embarquer en prison. » « C’était une manifestation totalement justifiée, les flics ont abusé de leur pouvoir et rien d’autre. » « Tu te rends compte que tu as un casier judiciaire maintenant ? » « Tu te rends compte que tes animaux innocents sont utilisés comme cobaye pour créer des produits stupides que Lennon achète ? Et puis au moins, j’ai gardé mes vêtements sur moi. »
« Mais le pire jour de ma vie, c’est certainement quand mon père m’a annoncée que ma sœur et moi allions vivre ensemble. Toutes seules. »

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Elle était en train de lire tranquillement quand elle entendit son portable vibrer sur sa table de chevet. Elle se leva de son fauteuil, plaça le marque-page dans son livre qu’elle ferma et abandonna sur la couverture dans laquelle elle s’était enroulée. Puis elle attrape son cellulaire et se laissa tomber sur son lit. Elle grogna quand elle vit ce que c’était. Alerte Gossip Girl. Elle avait beau la détester, cette Gossip Girl ne voulait pas la laisser tranquille et maintenant qu’elle était à l’université, elle entendait de plus en plus de rumeurs comme quoi elle préparait un ‘coup d’état’ pour s’instaurer au cœur de l’élite New-Yorkaise. Les rumeurs étaient dues à sa sœur et c’étaient malheureusement amplifiées. Aussi, dès que son stupide surnom apparaissait dans un post de son fléau personnel, son autre fléau personnel – à savoir sa sœur – lui tombait dessus pour lui demander des explications. Et pour savoir de quoi on l’accusait, elle s’était mise en alerte. Elle soupira en ouvrant la fenêtre se demandant ce que ça allait être cette fois. Elle grimaça en lisant le message. Est-ce que cette fille – ou homme qu’en savait-elle – avait des yeux partout ? Elle l’avait repérée avec le « copain » de sa sœur et se questionnait sur la fidélité de ce dernier et son goût pour la jeunesse. Nouvelle grimace. Le pire pensa-t-elle en entendant la porte de la chambre de sa sœur s’ouvrir à la volée, c’était qu’elle se posait la même question. Car il semblait que le prince charmant de sa sœur veuille jouer sur deux tableaux et la prendre pour princesse. Jamais de la vie pensa-t-elle. Aussi canon soit-il, le jour elle sortirait avec un prétentieux arriviste n’était pas encore arrivé.